Les Fées, Brian Froud - Alan Lee
Albin Michel

Antoine, ayant appris par un songe qu’il avait un prédécesseur, voulut le visiter. «Comme il le cherchait par les forêts, il rencontra d’abord un centaure, à demi homme, à demi cheval, qui lui dit d’aller devant lui. Il rencontra ensuite un animal qui portait des dattes et qui, par le haut du corps, ressemblait à un homme, avec le ventre et les pieds d’une chèvre. Antoine lui demanda qui il était: il répondit qu’il était un satyre, c’est-à-dire une de ces créatures que les païens prenaient pour des dieux des bois. Enfin, saint Antoine rencontra un loup qui le conduisit jusqu’à la cellule de saint Paul. Ces solitudes et dans ce récit il est précisé qu’elles étaient sylvestres restaient donc peuplées de divinités païennes; ici, elles n’ont rien d’hostile et se montrent même complaisantes.

Quant à la tentation qui assaille saint Antoine, scène qui a échauffé l’imagination de nombreux artistes, elle ressemble de bien près au sabbat des sorcières. Au Moyen Age encore, des êtres autrefois divins vivaient réfugiés dans les bois. L’Église n’avait pas réussi à les exorciser tous.

Sans doute, en avait-elle converti quelques-uns qui, à l’aventure, devinrent même des saints, et recouvert d’autres d’un vernis chrétien qui les rendit méconnaissables, mais il en restait encore, ils étaient trop nombreux et certains demeuraient irréductibles. Ceux-ci avaient conservé leur ancienne apparence: le Satan du Sabbat, cornu, au corps velu et aux pieds de bouc était le dieu Pan; faunes, sylvains et satyres devinrent des diables inférieurs, des incubes, ces démons qui prennent possession des femmes (les sorcières) pendant leur sommeil.

Saint Augustin, dans un passage de La Cité de Dieu, mentionne « les sylvains et les faunes que le peuple appelle incubes». Ils avaient dans les bois leurs adeptes, les sorciers et les sorcières.

Jacques Brosse  © 2001-2004  Asso Acteurs du Combat dit Lumeçon Service Fêtes Ville de Mons